Les Enseignements D'un Maître Zen - Au Fil Du Présent Éternel - Dokushô Villalba

J'avoue mon incompréhension devant des passages comme celui-ci:

-Regarde! Le corps c'est la coque de la noix, la pulpe c'est la conscience. Dans une noix de coco verte la conscience est collée à l'écorce mais dans une noix mûre, dans un être mûr, la conscience s'est décollée de l'écorce. C'est pour cette raison que l'écorce peut ouverte sans que la pulpe soit abîmée. Le corps d'un être mûr peut être brisé, sa conscience reste intacte.

Autrement dit le but de la pratique vu comme une ascèse, selon Dokushô Villalba  c'est de murir pour que la conscience reste intacte au moment de la mort. De tels propos chez un maître chrétien ou hindouiste ne me choqueraient pas. Dokushô Villalba est un disciple de Deshimaru et Deshimaru se plaignait que certains de ses disciples confondent christianisme hindouisme et bouddhisme. Ce qui m'étonne c'est que personne ne dise rien, pas la moindre critique nulle part. Je reconnais que, par ailleurs, Dokushô Villalba dit beaucoup de choses qui me semblent justes et il est probable que sa pratique soit authentique... et que le contenu doctrinal de sa pensée importe peu. Mais dans ce cas quel intérêt de lire ce livre? Autant ne lire que Dogen.

Dans le Bendowa:

Question : "certains disent : (...) Si nous savons que dans nos corps, il y a cette nature du cœur au delà de l’ apparaitre et du disparaitre, nous considérons celle-ci comme notre nature originelle. Tandis que le corps qui n'est qu'une figure provisoire, meurt ici et renait là (...) le cœur lui est permanent; il ne doit subir aucune altération dans le passé, le présent et le futur (...) et quand ce corps arrive à sa fin, ils entrent dans l'océan de la nature (...) à l'instar de la multitude des éveillés"

Réponse de Dogen: "L'opinion que vous venez d'exposer n'a absolument rien à voir avec la loi l'Eveillé. Cela n'est autre que l'opinion des senika, personnes hors de la Voie. (...) Comme je ne puis me taire, je vais tâcher avec compassion de vous sauver de cette opinion tordue. Sachez-le, dans la Loi de l'Eveillé, il est dit que le corps et le cœur ne font qu'un dès l'origine et que la nature et l'aspect ne sont pas deux choses distinctes. (...) comprenez  le fait que le cycle des naissances et des morts n'est autre que le Nirvana. (...) la multitude des existants, tout et chacun, ainsi que les dix mille phénomènes chatoyants comme la forêt drue ne sont autre qu'un seul cœur.
Maître Dôgen - Entretiens sur la Voie [Bendôwa] - Tome 6

Dogen rejette l'ascèse qui voudrait séparer le corps de l'esprit en mettant en avant le non-dualité du corps et de l'esprit mais aussi du samsara et du nirvana. Si vous posez zazen comme une technique qui permet de dissocier le corps de l'esprit et donc d'apprendre à mourir, comme sens même de l'existence  vous en fait un zazen souillé du désir d'atteindre le nirvana.

A la question qu'est-ce qui reste quand on s'est dépouillé du corps et du cœur? Il répond ailleurs l'homme originel qui ne cesse de pratiquer la voie et ici ce qui reste c'est la réalité chatoyante. Même si on traduit cœur par esprit, cet esprit n'est pas purement immatériel puisqu'il ne diffère en rien la réalité constituée des phénomènes apparaissant et disparaissant.